I – Argumentaire

Le journalisme est une activité professionnelle multiforme influencée par les transformations, reconfigurations et mutations de plusieurs ordres : sociales (incluant les paramètres économiques, culturels et politiques), technologiques (incluant la mobilité, les médias sociaux, les enquêtes en réseaux internationaux, les données massives, etc.) et professionnelles (spécialisations, formation continue, compétences et fonctions novatrices, etc.).

Sur le plan théorique, le journalisme est tantôt liquide (Deuze 2000), tantôt pluriel (Bernier et Watine 2019, Fowler-Watt et Jukes 2019), certainement en reconfiguration (Bernier et al. 2005) ou en mutations (Arnaud et Pignard-Cheynel 2014), toujours difficile à saisir (Ruellan 1993), en plus de se retrouver au cœur de grandes transitions démocratiques (Koch 2015). Il est au centre de tensions diverses, constamment en quête de crédibilité, de confiance et d’indépendance face aux puissances économiques, politiques, voire religieuses.

Comme bon nombre d’activités professionnelles, le journalisme est l’objet d’une formation qui se spécialise de plus en plus dans des lieux variés, allant de la formation pratique fondamentale jusqu’aux enseignements des cycles supérieurs.

Le Réseau Théophraste des centres francophones de formation au journalisme, conscient des enjeux et des défis de la formation, a décidé d’y consacrer son colloque annuel qui aura lieu les 27 et 28 mai 2020, à l’Institut Supérieur de l’Information et de la Communication.

II – Axes de réflexion

Les contributions attendues devraient porter idéalement, mais non exclusivement, sur les axes suivants :

Les nouveaux journalismes et leurs nouveaux formats.

Même si on en parle le plus souvent au singulier, il n’y a pas un journalisme, mais des journalismes qui diffèrent dans leurs fonctions, leurs rôles, leurs visées et leurs formats. Du journalisme d’enquête au journalisme de solution, en passant par des journalismes de développement, de paix, de persuasion ou de divertissement, ces journalismes adoptent des modes narratifs différents, cachent parfois leurs visées promotionnelles (marketing de contenu, etc.). La formation aux journalismes doit-elle privilégier la segmentation et la spécialisation pour tenir compte de ces formats différents ou bien demeurer générale? Les futurs journalistes doivent-ils être encouragés à maitriser certains journalismes considérés plus « nobles » que d’autres, alors même que l’écosystème médiatique favorise des journalismes qui s’éloignent de l’idéal-typique du journaliste démocratique soucieux de l’intérêt général?

Les nouveaux modes de réception et la place des publics.

Les publics peuvent être des partenaires (usagers créateurs de contenus), des adjuvants (on y trouve souvent des sources d’information de grande qualité), mais aussi des observateurs critiques qui exigent davantage de transparence et d’imputabilité en échange de la confiance et de la crédibilité qu’ils accordent aux journalistes. Les pratiques de consommation de l’information sont plus réactives que jamais de la part de publics hétéroclites, motivés et porteurs de convictions fortes qu’ils expriment sur différentes plateformes, parfois de façon hostile (Bernier 2016, Domingo et Heikkilä 2011, Von Krogh, 2012). Comment mieux préparer les futurs journalistes à entretenir un dialogue constructif avec leurs publics? Comment peut-on outiller les futurs journalistes à se protéger de l’hostilité et de l’agressivité de certains publics, qui peuvent les affecter sur le plan psychologique?

Les rôles journalistiques dans les sociétés

Les journalistes ont des rôles multiples, principalement d’information selon un certain idéal-typique, mais on les voit aussi agir comme agents de persuasion, de mobilisation, de promotion de certains intérêts ou de divertissement. Au-delà de la doxa normative, y a-t-il, de façon empirique, des frontières étanches et immuables entre le journalisme et la communication? Comment peut-on préparer les futurs journalistes à intégrer un marché du travail qui est souvent très différent de la représentation qu’ils en ont? 

Nouvelles pratiques pédagogiques

Compte tenu de ces enjeux et axes de réflexion, quelles pratiques pédagogiques novatrices est-il pertinent d’élaborer et de mettre en vigueur dans les écoles et centres de formation de journalisme?

Les enseignants, professeurs et chercheurs intéressés à participer à ce colloque international francophone doivent faire parvenir un résumé́ de 300 à 500 mots exposant leur problématique, leur méthodologie et, le cas échéant, les résultats anticipés.

Les propositions doivent être soumises au plus tard le 15 mars 2020, avec la mention Rabat2020, et envoyées à Marc-François Bernier (mbernier@uottawa.ca), président du comité́ scientifique du Réseau Théophraste. Une réponse sera acheminée au plus tard le 15 avril 2020. Les organisateurs du colloque prennent en charge les frais de logement (Hôtel).

Avec le soutien de

 

Bibliographie sommaire

ARNAUD Mercier et Nathalie PIGNARD-CHEYNEL (2014), « Mutations du journalisme à l’ère du numérique : un état des travaux », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 5 | 2014, mis en ligne le 17 juillet 2014, consulté le 04 août 2014, http://rfsic.revues.org/1097

BERNIER, Marc-François, et WATINE, Thierry (2019) « Penser les journalismes », Les Cahiers du journalisme, Recherches, 2019, vol. 2, n°3, p. R173-R180.

BERNIER, Marc-François (dir.) (2016) Le cinquième pouvoir : La nouvelle imputabilité́ des médias envers leurs publics, Québec, Presses de l’Université Laval.

BERNIER, Marc-François, François DEMERS, Alain LAVIGNE, Charles MOUMOUNI et Thierry WATINE, Pratiques novatrices en communication publique : Journalisme, relations publiques et publicité, Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 2005.

DEUZE, Mark (2000). What is journalism? Professional identity and ideology of journalists reconsidered », Journalism6(4), p. 442-464.

DOMINGO, David, et Heikki HEIKKILÄ (2011), Media accountability online: Constraints and opportunities for journalistic transparency and responsiveness, Nord Media 2011, congrès annuel des médias, Islande, août 2001.

FOWLER-WATT, K. (Ed.), JUKES, S. (Ed.). (2020). New Journalisms. London: Routledge,

KOCH, Olivier (2015), « Les médias dans les “ transitions démocratiques ” : état des lieux et prospective », Questions de communication, no 28, p. 211-229.

RUELLAN, Denis (1993), Le professionnalisme du flou : identité et savoir-faire des journalistes français. Grenoble : PUG.

Von KROGH, Torbjörn (2012), « Changing political attitudes toward media accountability in Sweden », Central European Journal of Communication, vol. 5, no 2, p. 204-223.

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